Il est d’usage, dans de nombreuses réunions, de poser la bienveillance comme principe. Noble principe et noble cause mais… au nom de quoi et pourquoi ? Vu de loin, nous ne pouvons qu’y voir du « bon ». Dire d’emblée que chacun fera de son mieux permet d’installer la confiance, sur la base de laquelle pourront s’établir des dialogues sains et constructifs.

Pour autant, des questions se posent. D’abord, qu’est-ce que la bienveillance, sinon un mot valise dans lequel chacun met ce qui lui plaît ou ce qui l’arrange ? S’agit-il, comme le mot lui-même le laisse entendre, de « bien veiller » sur autrui, quand je lui parle ou lui fais une remarque ? Est-ce à dire que je suis responsable de lui, comme une mère l’est de ses enfants ? Est-ce à dire encore que je dois veiller sur lui quelle que soit ma propre situation, y compris si je suis, avec lui, en désaccord, voire en opposition d’intérêt ? Ce qui pourrait signifier que je pourrais me « sacrifier » pour lui ou, disons, sacrifier une partie de mes propres intérêts à son bénéfice sans que, remarquez-le, il n’ait encore rien exprimé ni rien demandé. Ce serait, avouez-le, finalement assez peu le considérer, voire l’infantiliser.

Ou bien est-ce qu’être bienveillant signifie éviter toute sorte de désagrément lié aux disputes, aux cris, aux remarques désagréables ? Attitude qui peut conduire à retenir son propos au point de ne plus rien dire du tout. Ce pour quoi certains précisent : bienveillance sans complaisance. Ce qui rend la consigne plus obscure encore en ajoutant de la confusion à la confusion. Car se garder de complaisance n’éclaire pas sur ce qu’est la bienveillance. Et au moment où je dois dire quelque chose de difficile à l’autre, même au service de la relation, j’hésite et l’injonction de bienveillance peut vite me faire renoncer.

Il se peut que je force le trait, car nombreux sont ceux qui trouvent une vraie vertu à ce principe de bienveillance posé en début de réunion de travail. J’ai pourtant envie de proposer une alternative, pour aller plus loin : plus loin dans l’authenticité, plus loin dans la vérité des propos, plus loin dans l’approfondissement des relations dans le risque de la confrontation. Cette alternative est : le courage.

Le courage de dire, le courage d’entendre. Mais aussi le courage, après avoir dit, de s’entendre dire en réponse les effets de mes paroles sur autrui. Le courage de mettre la relation au risque de la confrontation. Du courage et quelques règles pour éviter que le débat ne dégénère, que l’un ou l’autre claque la porte, que le brouhaha s’installe. Du courage pour prendre le risque de la vérité.

La bienveillance viendra par surcroît.

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